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- Catégorie : Prédications
- Créé le dimanche 16 septembre 2018 10:30
- Écrit par Laurence GUITTON
QUI DITES-VOUS QUE JE SUIS ?
Chers amis,
Qui dites-vous que je suis ?
Dans la vie, dans la ville, parmi nos voisins, nos proches, il y a plein de gens qui gagnent à être connus ! Et Jésus lui aussi gagne a être connu ! Mais que connaissons-nous vraiment les uns des autres ?
Cette conversation entre Jésus et ses disciples, puis entre Jésus et la foule, cette conversation que l’évangéliste Marc nous retranscrit nous interroge sur ce que nous connaissons vraiment des autres, de Jésus et même de Dieu. Quelle image, quelles représentations en avons nous ?
Cet épisode est central dans cet évangile de Marc. Dans les huit premiers chapitres, Jésus s’est donné à connaître à travers ses paroles, ses enseignements, ses paraboles, ses guérisons… Dans les huit suivants, il va faire route vers Jérusalem, vers sa Passion, vers sa mort. Au centre de l’évangile se trouve l’épisode de la transfiguration, mais juste avant, dans le passage que nous venons de lire, Jésus fait un point d’étape. Qu’est-ce que tous ces gens ont vraiment appris et retenu jusqu’alors ? Que doivent-ils avoir saisi pour pouvoir continuer à me suivre jusqu’à la Croix, jusqu’à la mort, jusque DANS ma mort et ma résurrection ?
Et c’est avec des questions anodines que Jésus commence son évaluation : « Les gens, qui disent-ils que je suis ? Et vous, qui dites-vous que je suis ? Et VOUS, qui dites-vous que je suis ? » Le VOUS que Jésus adresse à ses disciples, l’auteur Marc l’adresse aussi à ses lecteurs et donc à vous, à moi.
A nous aussi, Jésus demande : Qui dis-tu, toi, que je suis ? Que connais-tu de moi, qu’as-tu appris de moi, sur moi, jusqu’ici ?
Et cette question en pose alors une autre. Que connaissons-nous, que savons nous vraiment les uns des autres ?
Il y a les gens qu’on ne connaît pas, les inconnus dans la rue, et il y a les gens avec qui on a fait connaissance. Ceux-la, on peut alors les re-connaître, lorsqu’on les croise, lorsqu’on les retrouve. Mais dans quelle mesure les connaissons nous vraiment ?
Nos enfants, on les connaît en principe comme si on les avait faits ! Mais ne nous surprennent-ils pas encore et toujours ? Avons nous vraiment fait le tour de leur personnalité ? N’ont-ils pas aussi leur vie, leur jardin secret que nous ne pénétrerons sans doute jamais ?
Et nos conjoints, que nous côtoyons au quotidien, avec qui nous partageons notre vie jusque dans ce qu’elle a de plus intime. Des conjoints qui se « connaissent » bibliquement selon l’expression consacrée : peuvent-ils prétendre tout savoir, avoir tout compris de l’autre ? Et je pourrais continuer avec nos collègues, nos amis, nos voisins…
C’est ce que nous démontre les réponses que donnent des disciples : Pour les gens, tu es Élie, Jean-Baptiste, un des prophètes : chacun s’est fait de Jésus une représentation différente, bien que toutes expriment ce que la figure du Messie véhicule avec elle d’attente, de promesse, d’espoir de salut. Tous ces noms égrenés prouvent bien que nous nous donnons finalement à voir sous des visages différents, ou que les autres projettent sur nous des images différentes. Nous n’avons pas un, mais des visages. On peut nous dire jovial, ou taciturne selon notre humeur. Doué ou nul en cuisine suivant si nous avons réussi ou pas notre recette, bon ou mauvais en maths ou en philo suivant si nous avons réussi ou pas notre examen… Personne ne peut prétendre nous connaître vraiment, car nous ne sommes pas en permanence égal à nous même ! Quant à se connaître soi-même... même au terme d’une longue psychanalyse, peut-on vraiment explorer la totalité de ce qui se joue inconsciemment chez nous ?
Dans notre vie de foi également, nous ne pouvons pas prétendre vraiment tout connaître, tout savoir, de Dieu et de Jésus-Christ. Et pourtant, Jésus insiste ici car visiblement, il y a une chose dont il voudrait être sûr, une chose qu’il voudrait que nous ayons vraiment comprise sur lui.
C’est alors que Pierre, qui dans l’Évangile de Marc est le bon élève de la classe (ou du moins le moins mauvais) confesse Jésus comme le Christ, le Messie, le Oint de Dieu. OUF, nous voilà soulagés. Car nous, nous le savons depuis le début de l’Évangile, grâce aux indices que Marc a semé ici et là dans les huit premiers chapitres. OUF ! Il y en a au moins un sur les douze qui est arrivé au même stade que nous, qui sait que Jésus est en effet le Messie qu’Israël attend, celui que Jean-Baptiste et tous les prophètes avant lui ont annoncé.
Mais la réaction de Jésus est déroutante : loin de le féliciter ou de le conforter dans ce qu’il affirme, il le rabroue, lui dit de passer derrière lui comme on mettrait le mauvais élève au piquet au fond de la classe ! Et il lui répond avec ce qui est la première des trois annonces de sa Passion . Il lui dit en une phrase laconique, qu’il n’est pas celui qu’il croit. Ils sous-entend qu’il est bien le Christ, mais qu’il n’est pas ce sauveur triomphant du peuple d’Israël, ce roi glorieux qui va restaurer le trône de David et ramener la paix, porté par un peuple libéré et en liesse.
Ce Messie tant attendu va devoir mourir par la main même des hommes. Il FAUT qu’il souffre, qu’il soit rejeté, qu’il meurt et enfin qu’il se relève de la mort. Il le FAUT !
On peut entendre trois choses dans ce « IL FAUT » :
- la fatalité divine : Dieu tout puissant en a décidé ainsi, et Jésus, obéissant, s’exécute. Il est un Dieu vengeur, et veut une victime en sacrifice pour le pardon de nos fautes.
- l’inéluctable de la folie des hommes : Vu ce qui se trame en secret avec les scribes, les pharisiens, les grand-prêtres, on ne pourra éviter cette condamnation et cette fin tragique, ça ne peut pas finir autrement.
- ou bien, en combinant plus ou moins les deux, comprendre que Dieu a décidé d’être la victime de notre folie afin de se donner à connaître, de se révéler dans la Croix.
Oui, Jésus veut nous faire comprendre ici que Dieu va se révéler à nous en vérité dans sa mort sur la croix : Dieu va nous apparaître faible, victime de la folie des hommes, il va nous faire connaître ainsi son vrai visage, sa vraie nature.
Alors, comme Pierre, dont la réaction face à cette annonce tragique trahit la désillusion, nous prenons conscience que meurent avec Jésus sur la Croix toutes les images que l’on s’était faites de Dieu. Nous découvrons à la fois sa faiblesse alors que nous le croyions fort, sa résignation alors que nous le croyions omnipotent. Mais nous découvrons aussi dans la résurrection que notre folie n’a pas le dernier mot.
Et c’est, selon le Christ, ce qu’il faut avoir compris pour continuer la route avec lui : se mettre à sa suite, ce n’est pas l’accompagner vers son triomphe à Jérusalem (souvenez-vous aussi du récit des Rameaux). Mais c’est l’accompagner vers la mort, dans la mort, sur la Croix. Non pas se tenir au pied, pour se lamenter ou demander pardon, mais mourir avec lui, et avec toutes les images que nous avions de Dieu, d’un salut que nous pouvions gagner ou monnayer de notre vivant. Mourir, et ressusciter avec lui comme dans le Baptême pour comprendre que nos vies sont des successions de morts que nous traversons, et dont nous nous relevons vivants, et sauvés par pure grâce.
Lors de ce point d’étape, Jésus a redéfini la feuille de route, et expliqué ce qui attendait ceux qui fidèlement accepteraient de continuer à le suivre. Cela sous-entend errer à sa suite, assumer notre propre faiblesse et notre manque de foi, pour à l’arrivée mourir avec lui, et rencontrer Dieu, mais le Dieu de la Croix.
Et nous voilà déroutés, déboussolés nous aussi à cette annonce: nous ne savions finalement pas qui était Dieu. Ou du moins, nous en avions une image faussée, erronée.
Le dieu que l’évangéliste Marc nous donne à connaître au fil de son récit, ce Dieu incarné en Jésus-Christ, son Fils bien-aimé, ce Dieu est un Dieu faible qui accepte la plus atroce des morts, qui nous entraîne à sa suite et nous relève avec lui.
Derrière ce « qui dis-TU que je suis ? », Jésus nous pose à chacune et à chacun une question radicale qui déplace et bouscule notre foi, notre conception de Dieu, notre existence... notre Vie. Sais-tu vraiment qui je suis, ce que j’attends de toi, ce que je suis venu te faire comprendre ?
Car la folie de Dieu est plus sage que les hommes, et la faiblesse de Dieu est plus forte que les hommes. 1Corinthiens 1, 25.
Amen
Jésus part avec ses disciples vers les villages voisins de Césarée de Philippe. Sur le chemin, il demande à ses disciples: «Pour les gens, qui suis-je?»
Les disciples lui répondent: «Les uns disent que tu es Jean-Baptiste. D’autres disent que tu es Élie. D’autres encore disent que tu es l’un des prophètes.»
Jésus leur demande: «Mais vous, qu’est-ce que vous dites? Qui suis-je?» Pierre lui répond: «Tu es le Messie.»
Alors Jésus leur commande sévèrement: «Ne dites rien à personne!»
Ensuite, Jésus commence à enseigner ceci à ses disciples: «Il faut que le Fils de l’homme souffre beaucoup. Les anciens, les chefs des prêtres et les maîtres de la loi ne voudront pas de
lui. Ils le feront mourir. Et, trois jours après, il se relèvera de la mort.»
Il leur dit cela très clairement. Alors Pierre prend Jésus à part et il se met à lui faire des reproches.
Jésus se retourne, il regarde ses disciples et il fait des reproches à Pierre. Il lui dit: «Va-t’en ! Passe derrière moi, Satan ! Tu ne penses pas comme Dieu, mais comme les hommes !»
Ensuite, Jésus appelle la foule avec ses disciples et il leur dit: «Si quelqu’un veut venir avec moi, il ne doit plus penser à lui-même. Il doit porter sa croix et me suivre. En effet, celui qui veut sauver sa vie la perdra. Mais celui qui perdra sa vie à cause de moi et de la Bonne Nouvelle, il la sauvera.
Si une personne gagne toutes les richesses du monde, mais si elle perd sa vie, à quoi cela lui sert-il ?
Qu’est-ce qu’on peut payer en échange de la vie ?
Les gens d’aujourd’hui sont pécheurs et infidèles à Dieu. Si quelqu’un a honte de moi et de mes paroles au milieu de ces gens-là, alors moi, le Fils de l’homme, j’aurai honte de lui quand je viendrai avec les anges saints, dans la gloire de mon Père.»