POUR QUE JUSTICE ET PAIX S'EMBRASSENT...

Deutéronome 16, 11 à 20  -  Psaume 85  -  Luc 4, 14 à 21

Célébration œcuménique de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens

Chers frères et sœurs en Christ,

« Unis dans la diversité », telle est la devise de l’état de l’Indonésie, qui parraine cette année la semaine de Prière pour l’Unité des Chrétiens. Une devise qui résonne à l’unisson avec notre désir de réunifier notre Église chrétienne divisée.

Et pourtant, c’est un cri d’alerte que lance vers nous ces Églises chrétiennes indonésiennes en proposant à notre méditation ce chapitre 16 du Livre du Deutéronome. « Tu rechercheras la justice, rien que la justice, afin de vivre et de prendre pleinement possession de ce pays que le SEIGNEUR, ton Dieu, te donne. »
Dans ce pays où les traditions ancestrales cultivaient un vivre ensemble solidaire, fraternel et respectueux des différences, l’injustice gangrène aujourd’hui la société. Et si nous y regardons de plus près, ce constat n’est pas spécifique à ce pays : sous des formes diverses et à des degrés divers, il est celui de bien des pays, bien des gouvernements, bien des systèmes judiciaires dans le monde aujourd’hui.

Que déplorent nos frères et sœurs indonésiens ? Justement la perte de ce que ces versets du Deutéronome énumèrent comme la garantie de l’impartialité des tribunaux. Ils déplorent la corruption, la collusion, l’usage de critères préférentiels ou de passe-droits, le déni de la sagesse et du bon-sens.

Il nous faut comprendre dans ce texte que le rôle de la justice n’est pas uniquement de juger, de trancher, de condamner ou de punir. Elle n’est pas qu’un tribunal correctionnel. La justice, et avec elle ses juges, est aussi là pour reconnaître et compenser les inégalités que génèrent les aléas de la vie et de notre condition humaine.

Lorsque nous parlons de justice, nous devrions entendre le mot justesse, comme ce qui est bien ajusté, bien mesuré, bien pesé, bien dosé. A l’instar de l’équilibre recherché entre les deux plateaux de la balance, la justice recherche la justesse de la relation entre tous les hommes, et elle est la fille de la justesse et de l’équité de la relation entre les hommes et Dieu.

Car si nous reconnaissons que la diversité est une richesse à tout point de vue, elle est aujourd’hui comme hier source de bien des déséquilibres.

Voyez le souci qu’a le législateur du Deutéronome pour que ne soient pas oubliés, au moment de fêter la moisson et les récoltes, ceux qui ne possèdent pas de terres cultivables : les femmes et les enfants, mais aussi les prêtres, les esclaves, les veuves, les immigrés.
Voyez comment Jésus, dans cette prédication à la synagogue qui inaugure son ministère, tient à faire des plus injustement lotis les premiers bénéficiaires de cette Bonne Nouvelle du Royaume : les pauvres, les captifs, les infirmes, les opprimés. Cette Bonne Nouvelle vient renverser l’équilibre ancien qui n’était qu’une illusion de justice. Ici commence cette annonce du Royaume où les premiers seront les derniers. Elle préfigure déjà le Sermon sur la Montagne : Bienheureux ceux qui ont soif et faim de justice, ils seront rassasiés.
En eux s’accomplira la Justice et la paix du Royaume de Dieu.

Car comment ne pas comprendre alors la Paix comme le fruit même de la justice ?

« Le droit habitera dans le désert et dans le verger s’établira la justice.
Le fruit de la justice sera la paix : la justice produira le calme et la sécurité pour toujours. » nous dit le prophète Ésaïe,

« Le fruit de la justice est semé dans la paix pour ceux qui font œuvre de paix.» nous est-il rappelé dans l’épître de Jacques.

Justice et paix sont indissociables et complémentaires, mère et fille l’une de l’autre. Elles sont des dons de Dieu, une volonté divine qu’il nous est demandé d’accueillir et d’incarner pour que se matérialise le Royaume promis.
La paix est un état de plénitude et d’abondance qui ne peut s’établir que grâce au fragile équilibre de la justice, à la justesse des relations entre les hommes.

Avec la fidélité et la vérité, la paix et la justice sont omniprésents dans la Bonne Nouvelle des quatre évangiles. Elles sont au cœur de cette prédication de Jésus venu pour annoncer le Royaume de Dieu. Et ce ne sont pas de grands concepts philosophiques ou théologiques abstraits. Ce sont des réalités existentielles, des raisons d’être pour les hommes et les femmes que nous sommes. Des choses qu’il nous faut éprouver au quotidien. Tu rechercheras la justice, rien que la justice, afin de vivre ! Afin d’en vivre tous les jours.

Mais comment faire pour que la justice et la paix ne restent pas que des vœux pieux et utopiques ? Pour qu’ils deviennent, comme le Christ nous y invite, une réalité, les fondations de notre vivre ensemble ?

Je répondrai qu’à la fois, nous n’avons rien à faire, et tout à faire.
Rien à faire car la justice et la paix sont avant tout, nous l’avons dit, des dons de Dieu.
Mais tout à faire car ça n’est que par nos actions qu’ils peuvent se réaliser dans nos vies, dans nos vies individuelles comme dans nos vies collectives.

Et pour ce faire, nous l’avons entendu, le maître-mot est l’accueil :

  • l’accueil de la Parole du Christ, que d’emblée l’on voudrait rejeter tant ce message renverse et déconstruit ce que nous considérions comme des équilibres bien établis,
  • mais aussi et surtout l’accueil de l’autre, dans le respect de ses différences. Un accueil qui invite au dialogue, au dialogue des cultures, des religions, des civilisations, des nations, au dialogue social. Un dialogue qui ne va pas de soi.

C’est grâce à ce dialogue que nous pourrons alors combattre ensemble :
Combattre l’injustice pour que triomphe la justice,
Combattre la violence pour que triomphe la paix
Combattre l’égoïsme pour que triomphe la dignité et les droits de l’homme.

C’est un combat de tous les instants, à tous les niveaux : personnel, familial, national, ecclésial, mondial.  Mais il est le préalable à la réconciliation de tous les hommes, pour qu’enfin sur cette terre justice et paix conjuguent leurs équilibres et fassent que nos diversités puissent cohabiter pour le bonheur de tous.

En communion avec tous les chrétiens du monde réunis en ce jour, je vous invite à la prière pour l’unité, pour la paix et la justice :

À la suite de Jésus priant pour l’unité de ses disciples et proclamant la parole du prophète Isaïe, nous voulons à notre tour nous engager sur un chemin de justice, de paix et d’unité.

Disciples de Jésus, nous sommes appelés à demeurer libres face à la séduction de l’argent :vivons dans la simplicité et l’intégrité.

Disciples de Jésus, nous sommes appelés à œuvrer pour la libération des victimes de toute forme de violence : défendons le respect et la dignité de tout être humain.

Disciples de Jésus, nous sommes appelés à offrir l’hospitalité aux étrangers : dépassons nos peurs et nos égoïsmes.

Disciples de Jésus, nous sommes appelés à respecter toute la création : protégeons la vie et la beauté du monde.
Esprit saint, fais-nous agir ensemble. Dieu de grâce, accepte nos engagements et transforme-les en actes pour l’unité de ton église, et pour que règne la paix et la justice dans ce monde.

                                                                                                                                        Amen

 


Deutéronome 16, 11 à 20

10 Puis tu célébreras la fête des Semaines pour le Seigneur ton Dieu, en apportant des dons spontanés à la mesure des bénédictions dont le Seigneur ton Dieu t’aura comblé.
11 Au lieu que le Seigneur ton Dieu aura choisi pour y faire demeurer son nom, tu seras dans la joie devant le Seigneur ton Dieu, avec ton fils, ta fille, ton serviteur, ta servante, le lévite qui est dans tes villes, l’émigré, l’orphelin et la veuve qui sont au milieu de toi.
12 Tu te souviendras qu’en Égypte tu étais esclave, tu garderas ces lois et tu les mettras en pratique.
13 Quant à la fête des Tentes, tu la célébreras pendant sept jours lorsque tu auras rentré tout ce qui vient de ton aire et de ton pressoir.
14 Tu seras dans la joie de ta fête avec ton fils, ta fille, ton serviteur, ta servante, le lévite, l’émigré, l’orphelin et la veuve qui sont dans tes villes.
15 Sept jours durant, tu feras un pèlerinage pour le Seigneur ton Dieu au lieu que le Seigneur aura choisi, car le Seigneur ton Dieu t’aura béni dans tous les produits de ton sol et dans toutes tes actions ; et tu ne seras que joie.
16 Trois fois par an, tous tes hommes iront voir la face du Seigneur ton Dieu au lieu qu’il aura choisi : pour le pèlerinage des pains sans levain, celui des Semaines et celui des Tentes. On n’ira pas voir la face du Seigneur les mains vides :
17 chacun fera une offrande de ses mains suivant la bénédiction que t’a donnée le Seigneur ton Dieu.
18 Tu te donneras pour tes tribus des juges et des scribes dans toutes les villes que le Seigneur ton Dieu te donne ; et ils exerceront avec justice leur juridiction sur le peuple.
19 Tu ne biaiseras pas avec le droit, tu n’auras pas de partialité, tu n’accepteras pas de cadeaux, car le cadeau aveugle les yeux des sages et compromet la cause des justes.
20 Tu rechercheras la justice, rien que la justice, afin de vivre et de prendre possession du pays que le Seigneur ton Dieu te donne.

Psaume 85

1 Du chef de chœur, des fils de Coré, psaume.
2 Tu as montré ton amour pour ton pays, Seigneur !
tu as fait revenir les captifs de Jacob ;
3 tu as enlevé la faute de ton peuple,
tu as couvert tout son péché. Pause.
4 Tu as mis fin à ton emportement,
tu es revenu de ton ardente colère.
5 Fais-nous revenir, Dieu notre sauveur !
renonce à ta rancune envers nous.
6 Seras-tu toujours irrité contre nous,
prolongeant ta colère d’âge en âge ?
7 N’est-ce pas toi qui reviendras nous faire vivre
et qui seras la joie de ton peuple ?
8 Montre-nous ta fidélité, Seigneur,
et donne-nous ton salut.
9 J’écoute ce que dit Dieu, le Seigneur ;
il dit : « Paix », pour son peuple et pour ses fidèles,
mais qu’ils ne reviennent pas à leur folie !
10 Son salut est tout proche de ceux qui le craignent,
et la gloire va demeurer dans notre pays.
11 Fidélité et Vérité se sont rencontrées,
elles ont embrassé Paix et Justice.
12 La Vérité germe de la terre
et la Justice se penche du ciel.
13 Le Seigneur lui-même donne le bonheur,
et notre terre donne sa récolte.
14 La Justice marche devant lui,
et ses pas tracent le chemin.

Luc 4, 14 à 21

14 Alors Jésus, avec la puissance de l’Esprit, revint en Galilée, et sa renommée se répandit dans toute la région.
15 Il enseignait dans leurs synagogues et tous disaient sa gloire.
16 Il vint à Nazara où il avait été élevé. Il entra suivant sa coutume le jour du sabbat dans la synagogue, et il se leva pour faire la lecture.
17 On lui donna le livre du prophète Ésaïe, et en le déroulant il trouva le passage où il était écrit :
18 L’Esprit du Seigneur est sur moi parce qu’il m’a conféré l’onction pour annoncer la Bonne Nouvelle aux pauvres. Il m’a envoyé proclamer aux captifs la libération et aux aveugles le retour à la vue, renvoyer les opprimés en liberté,
19 proclamer une année d’accueil par le Seigneur.
20 Il roula le livre, le rendit au servant et s’assit ; tous dans la synagogue avaient les yeux fixés sur lui.
21 Alors il commença à leur dire : « Aujourd’hui, cette écriture est accomplie pour vous qui l’entendez. »

Textes : Traduction œcuménique de la Bible